Question de style…

« Tu vois c’est un peu comme du Prokofiev avec une touche de Bernstein sur un fond de musique minimaliste, enfin tu peux pas ne pas le reconnaître, tu entends, tu sais que c’est lui ! »

Comment définir, par quelques mots, le style d’un compositeur ? Mis à part se lancer dans une série de comparaisons plus hasardeuses les unes que les autres, parce qu’elles mêmes liées à la propre perception que l’on a du style justement des référents choisis, donc mis à part cette liste audacieuse et risquée, ou tout autre expérience comparative avec un autre art, il me semble justement extrêmement compliqué de donner corps par du verbal à ce qui caractérise l’essence même d’un compositeur.

Pour les plus tatillons, on peut analyser froidement le contenu musical, le matériel utilisé, les systèmes récurrents, peut être et sans doute même dégager quelques constantes. Mais, je ne suis pas certain que cela suffise. On pourra trouver des systèmes communs, des usages communs à plusieurs compositeurs et pourtant dans leur manière de les utiliser, il y a un infime détail, quelque chose d’impalpable qui les rend uniques.

Le style : l’art et la manière, l’art et la matière, soit la manière de travailler la matière. Qu’il le veuille ou non, chaque compositeur, sorti de sa période d’incubation nécessaire à l’assimilation de ses écoutes a un style, plus ou moins prononcé, identifiable, identifié et assumé. Il est fatalement le fruit de son histoire, de sa culture, de ses pratiques, de son apprentissage et de ses choix conscients ou non.

La question, je crois, que doit se poser chaque compositeur est de savoir se reconnaître et se connaître. Un petit coté connais-toi toi-même, je l’avoue. Connaissance pour le moins nécessaire et utile quand il s’agit de composer au service d’une œuvre collective tel que peut se définir un film.

Le réalisateur avec lequel nous travaillons, est-il venu pour notre style ? Pour ce qu’il a identifié de nous ou notre capacité technique ? Pour notre ressemblance à une référence qui lui appartient et qu’il sera peut être bien en mal de donner ? Quel élément de nous-mêmes  de notre travail, de notre écriture a fait écho chez l’autre ? C’est à cet instant qu’il convient d’être en phase avec soi-même, de savoir ce qui nous appartient, ce qui est emprunt, ce qui est technique pour avoir la distance nécessaire, le recul et la justesse avant de s’engager dans l’écriture. Le style est aussi une forme d’élégance, celle qui consiste à ne pas se gargariser d’avoir été le compositeur élu mais bien de demander humblement qu’est-ce qui a résonné chez le réalisateur ? Et, en écoutant ensemble quelques œuvres passées, mettre le doigt sur pause et simplement dire, c’est là, c’est ça. Alors on aura une idée de la matière et l’on pourra y appliquer notre manière avec style…

Nathanaël

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